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Le 2ème REP est l'héritier direct du 2ème bataillon étranger de parachutistes.

Le 2ème REP est l'héritier direct du 2ème bataillon étranger de parachutistes. Mais en qualité de seule unité parachutiste de la Légion étrangère encore en activité, le 2ème REP est également l'héritier de toutes les unités paras Légion d'Indochine et d'Algérie, soit de la compagnie parachutiste du 3ème régiment étranger d'infanterie, précurseur en la matière, des 1er , 2ème et 3ème Bataillons étrangers de Parachutistes d'Indochine et du 1er Régiment étranger de Parachutistes d'Algérie.

Le 2ème BEP voit le jour à Sétif en 1948. Dès le début de 1949, ce bataillon est engagé en Indochine où il se couvre de gloire ; il y restera jusqu'en 1955, date à laquelle il s'embarque pour l'Algérie après avoir reçu la fourragère aux couleurs de la Légion d'honneur. C'est à cette même époque qu'il se réorganise pour adopter une structure régimentaire et devenir le 2ème REP. Depuis sa création, le 2ème REP a toujours été à la pointe des engagements de l'armée française, comme l'indique la liste des opérations auxquelles le régiment a participé (Indochine, Algérie, Kolwezi, Tchad, Liban, Gabon, Golfe, Somalie, Rwanda, Djibouti, Bosnie, RCA, Brazzaville, Bosnie, Kosovo, Côte d'Ivoire,Afghanistan,Mali.

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Infos 2 éme REP

Infos  2 éme REP
REP INFOS 01.2016

15 avr. 2011

Avril 1961 - Il y a 50 ans, disparaissait, en Algérie, la plus prestigieuse unité de Légion étrangère…


LA FIN DU 1er REGIMENT ETRANGER DE PARACHUTISTES





« La mémoire n'est pas seulement un devoir, c'est aussi une quête »(Commandant Hélie de Saint-Marc - " Les champs de braises ")


«L’Honneur est-il dans l’obéissance absolue au pouvoir légal, ou dans le refus d’abandonner des populations qui allaient être massacrées à cause de nous ? J’ai choisi selon ma conscience. J’ai accepté de tout perdre, et j’ai tout  perdu. (…) Je connais des réussites qui me font vomir. J’ai échoué, mais l’homme au fond de moi a été vivifié.(Commandant Hélie de Saint-Marc, Commandant en second du 1er REP - « L’aventure et l’espérance »)

22 Avril 1961

            Une agitation anormale prenait naissance. On signalait des mouvements imprévus des véhicules de groupes de transport. Il était une heure du matin et les légionnaires du 1er REP, commandés par le Commandant, Elie Denoix de Saint-Marc, fonçaient sur Alger.
Pouvait-on vivre chargés de honte? La France s’enfonçait dans les égouts, la France n’existait plus. A son secours volaient les légionnaires, prêts à verser leur sang si la légion le leur demandait, marchant de leurs pas d’éternité vers la vie, vers la mort, fidèles à eux-mêmes, aux pierres tombales qui jonchaient leur route, fidèles à l’honneur.
Au même moment, d’autres « Seigneurs de la guerre » investissaient les grandes villes d’Algérie : le 1er Régiment Etranger de Cavalerie du Colonel de la Chapelle, le 5ème Régiment Etranger d’Infanterie du Commandant Camelin, le 2ème Régiment Etranger de Parachutistes entraîné par ses capitaines et son commandant, le cdt Cabiro, dès lors que son chef, le colonel Darmuzaiétait « déficient », les 14ème et 18ème Régiments de Chasseurs Parachutistes des Colonels Lecomte et Masselot, le groupement des commandos de parachutistes du Commandant Robin, les commandos de l’airdu Lieutenant-colonel Emery… Les fleurons de la 10ème et de la 25ème Division de Parachutistes.
Et puis d’autres unités se rallient au mouvement : le 27ème Dragons du Colonel Puga, le 7ème Régiment de Tirailleurs Algériens, le 1er Régiment d’Infanterie de Marine du Commandant Lousteau, le 8ème RPIMA du ColonelLenoir, le 94ème RI du Colonel Parizot,  le 1er RCP du Colonel Plassard, le 9ème RCP du Colonel Brechignac… A noter aussi le ralliement immédiat desharkis du Commandant Guizien, basés à Edgar-Quinet, village situé au pied de l’Aurès. Au lendemain du cessez-le-feu, ils paieront très cher leur fidélité : un millier de ces supplétifs, avec femmes et enfants, seront massacrés dans des conditions effroyables…
            
« Nous sommes des morts en sursis, expliquaient-ils. Notre peau ne compte pas. Nous irons jusqu’au bout de nos idées » et, sur le drapeau tricolore veillé par un parachutiste, était inscrit en lettres de feu : « Tu vas où l’on meurt ! ».
            Néanmoins quelque chose avait filtré du projet. Il n’est pas de secret que puissent garder tant d’hommes en marche vers leur mystérieux rendez-vous. De confuses alertes chuchotées de bouche à oreille avaient couru d’un bout à l’autre de l’Algérie, affolant par l’imminence d’un événement qu’ils pressentaient, de courageux officiers qui s’étaient ainsi rués dans l’une de ces échappatoires qui leur permettrait, plus tard, de pouvoir se disculper tant auprès des vaincus que des vainqueurs. Ils s’étaient fait mettre en permission pour éluder le choix et des quatre coins d’Algérie, des chefs étaient partis pour ne pas être présents quand se lèveraient les aurores difficiles… 
            Fallait-il dans ce cas employer la force? C’est dans de tels moments que bascule le destin des hommes… et c’est à ce moment-là que bascula celui de l’Algérie française.
Parce que la fraction de l’armée qui s’était révoltée refusait de mener le même combat que la rébellion, la bataille allait être perdue. Parce que les généraux, notamment le général Challe, avaient eu la naïveté de croire qu’une révolution se faisait sans effusion de sang et pouvait se gagner uniquement avec le cœur et de nobles sentiments, ils allaient entraîner avec eux dans leur perte les meilleurs soldats que la France n’ait jamais eus… et tout un peuple crédule et soumis.
A l’évidence, ils négligèrent les recommandations d’un célèbre révolutionnaire : Fidel Castro, dont la doctrine était la suivante : « Pour faire une révolution, il vaut mieux un chef méchant que plusieurs chefs gentils ».

   25 Avril 1961


            Le général Challe prend la décision de mettre fin au soulèvement et de se livrer au bon vouloir de Paris. Ce faisant, il va consacrer la défaite des plus belles unités, livrer 20 ans de sacrifices et d’expérience. Ce qu’il remet à l’ennemi, c’est la force morale d’une armée qui retrouvait le goût de vaincre, c’est tout un capital jeune et révolutionnaire qu’elle avait amassé avec tant de souffrance pour la nation.
            Dès lors, le choc psychologique provoqué par la reddition du chef va être considérable. Dans des circonstances d’une telle intensité dramatique, la fermeté du commandement est la bouée qui retient les faibles et les indécis. Qu’elle vienne à couler et c’est le sauve-qui-peut. Remontent alors en surface les résidus de l’humanité : les attentistes, les lâches et les habiles ! Ah ! Il ne leur reste pas beaucoup de temps pour sortir de leur prudence et prouver qu’ils méritent d’accéder au grade supérieur. Du coup, l’Etat retrouve pléiade de serviteurs zélés, moutons de Panurge revus et corrigés par l’Elysée, même si le grand cordon d’une légion d’honneur leur sert de collier.
            C’est désormais la débandade ! Outre les officiers qui ont refusé de franchir le rubicon et qui louent désormais le Seigneur pour leur « bon choix », de nombreux officiers putschistes, sentant le vent tourner, se rallient au pouvoir. Les rats quittent le navire !…
            Et ce fut la fin! Les camions défilèrent un à un avec leur chargement de généraux, de colonels, de paras et de légionnaires. Les hommes chantaient une rengaine d’Edith Piaf : « Non, rien de rien… Non, je ne regrette rien » tandis que d’autres camions arrivaient maintenant, portant des soldats du contingent métropolitain qui chantaient, indifférents à la peine des uns et des autres : « Les Pieds-Noirs sont dans la merde » sur l’air des « gaulois sont dans la plaine ».
            Ainsi durant quatre jours et cinq nuits, des hommes valeureux avaient tenté de sauver l’Algérie. Son corps se vidait de son sang, tout sombrait. Leur dignité imposait de se  conduire en Seigneurs, même s’ils étaient chargés de tout le désespoir du monde. Ne rien regretter ? Si ! D’avoir perdu. Et des camions qui roulaient maintenant dans la nuit profonde, toujours ce chant qui s’élevait encore plus vibrant :
            « Non, rien de rien
             Non, je ne regrette rien… »
JE NE REGRETTE RIEN, ce cri allait désormais devenir l’hymne de ceux qui avaient osé et qui avaient tout sacrifié… sauf leur honneur.
            C’étaient des hommes vaincus –provisoirement-, courageux et généreux qui connaissaient l’adversité. Les légionnaires se souvenaient pour la plupart de leurs combats pour la liberté en Pologne ou en Hongrie, pour d’autres, ceux des rizières du Tonkin, pour d’autres encore, ceux de That-Khé, Dong-Khé, Cao-Bang, Diên Biên Phu qui furent les tombeaux d’unités prestigieuses telles que les 2ème et 3ème Régiments Etrangers et du 1er BEP -Bataillon Etranger de Parachutistes-, celui-là même dont les légionnaires du 1er REP étaient les fiers héritiers…
Les appelés des 14ème, 18ème RCP et des commandos, trop jeunes pour avoir connu tant de gloire, demeuraient traumatisés par ces visions apocalyptiques qui les hantaient et que représentaient ces visages lacérés où les yeux manquaient, ces nez et ces lèvres tranchés, ces gorges béantes, ces corps mutilés, ces alignements de femmes et d’enfants éventrés, la tête fracassée, le sexe tailladé. Tous, à ce moment ignoraient le désespoir et savaient que demain la lumière brillerait à nouveau. C’étaient des révoltés à la conscience pure, des soldats fidèles, des Hommes… des vrais !
Quel contraste étonnant cependant entre ces Seigneurs de la guerre que l’on montrait aujourd’hui du doigt sous le sobriquet fallacieux de « mercenaires » et de « factieux », ces soldats-loups à la démarche souple de félins accoutumés à la chasse et au guet, infatigables dans le chaos minéral de l’Aurès, soldats perdus dont l’uniforme collait comme une peau de bête, acceptant le défi de la guerre dans les défilés étroits comme des pièges, sur les pitons enneigés ou brûlés par le soleil, dans l’enfer du désert où le monde mort a chassé celui des vivants… et ces hommes flasques qui entonnaient de plus belle leurs incantations à la quille !…
Au lendemain de la reddition des généraux, le général de Gaulle s’empressa d’épurer l’armée française. L’occasion était trop belle d’en finir avec les contestataires trop fidèles à leur idéal et en leur parole. C’est ainsi, qu’outre les centaines d’arrestations opérées dans les milieux militaires, policiers et civils, les régiments qui avaient constitué le « fer de lance » du putsch : 1er REP, 14ème et 18ème RCP, Groupement des commandos Parachutistes et Commandos de l’air, allaient être dissous. Le 2ème RPIMA quant à lui, allait être expulsé de ses cantonnements. Dissoutes, également la 10ème et la 25ème Division de Parachutistes. Ne pouvant  éliminer toutes les unités compromises sous peine de réduire à néant la force opérationnelle, seul leur encadrement serait sanctionné…

            C’est ainsi qu’au cantonnement du 1er REP, l’ordre vint, sec et cruel. Le régiment était aux arrêts ! Tous les officiers de cette prestigieuse unité devaient sur le champ se constituer prisonniers. Beaucoup de légionnaires refusaient de s’incliner ; ils voulaient livrer un ultime baroud d’honneur. Leur « Camerone » à eux, ils le souhaitaient, ils le désiraient. Mais toute résistance devenait désormais inutile. Leur sacrifice aurait été vain, l’Etat était trop puissant, la France entière était contre eux, elle les avait reniés et l’Algérie était d’ores et déjà condamnée. Les blindés de la gendarmerie mobile cernaient le cantonnement, prêts à leur donner l’assaut. La flotte était là à quelques encablures, ses canons pointés vers eux. Allons ! Il faut céder. C’en est fini du 1er REP…
            La population européenne tout entière se dirigea vers le camp de Zéralda où les légionnaires étaient cantonnés. Elle voulait dire adieu à « son » régiment, le saluer une dernière fois, lui dire encore et toujours : Merci ! Merci à « ses » légionnaires. Les commerçants baissaient leurs rideaux, les jeunes filles portaient des brassées de fleurs. A eux, les portes du camp s’ouvrirent. Les journalistes furent interdits. « Vous ne verrez pas pleurer les légionnaires ! » leur lança un officier. Même les cinéastes du service cinématographique des armées furent refoulés. Pas question de filmer la mort du REP!
            Le silence se fit. Une ultime et bouleversante cérémonie aux couleurs, réunit autour du grand mât blanc, la population  et ces valeureux baroudeurs, jeunes d’Algérie et vétérans d’Indochine.
Soudain, de la foule en larmes, surgit  une petite fille. Tel un ange de blanc vêtu, elle s’avança vers les rangs des légionnaires, une feuille à la main. D’une voix douce et faible elle en fit la lecture. C’était l’ultime hommage du petit peuple de Zéralda à leurs enfants en reconnaissance de leurs sacrifices, leur courage et leur fidélité. Puis elle éleva sa petite main jusqu’à sa bouche et dans un geste empreint d’une infinie tendresse, leur adressa un baiser. A ce moment, les applaudissements crépitèrent et une pluie de pétales de rose tournoya dans les airs.
            Gagnés par l’émotion et la rancœur, des légionnaires parachutistes, le visage tendu, les yeux rougis, sortirent des rangs et ôtèrent leurs décorations couvertes d’étoiles, de palmes et de gloire et les jetèrent devant eux. L’assistance  regardait avec une sorte d’effroi ces médailles qui jonchaient le sol. Des femmes les ramassaient et en les embrassant, les rendaient aux paras : « Si, si, reprenez-les ! » Des officiers pleuraient.
Puis ce fut l’embarquement dans les camions. Certains criaient : « De Gaulle au poteau ! », d’autres « Algérie française quand même! ». Sur leurs joues, des larmes coulaient. D’autres s’efforçaient de sourire à la foule venue en masse pour les saluer et qui s’époumonait à hurler sur leur passage : « Vive la légion ! », tandis qu’à la vue des képis blancs, les gendarmes mobiles s’effaçaient.
            La colonne traversa la petite ville où les Européens qui n’avaient pu se rendre au camp couraient sur les trottoirs, leur lançant un ultime adieu. Des mains jetaient des fleurs sous les roues des camions.
Un à un, les lourds véhicules passèrent au milieu des cris, des larmes, des baisers envoyés à la volée. Alors, de la colonne, couvrant le grondement des moteurs, 1200 légionnaires, partagés entre la colère et le chagrin, entonnèrent un refrain aux lentes cadences, pathétique, triste, entrecoupé de sanglots :
« Non, rien de rien,
 Non, je ne regrette rien… »
            Le convoi du 1er REP roulait sur un tapis de roses, de  lilas et de pensées. Voie triomphale et triste. Et sous les baisers, les acclamations, les larmes et les fleurs, il disparut dans un dernier nuage de poussière, convoi de mariniers halé par une complainte grave, emportant avec lui les plus folles espérances…
Pauvre régiment ! Si glorieux ! Que triste est ton sort aujourd’hui ! Et dans son sillage se traînait déjà, lamentablement, le fantôme déguenillé de l’Algérie française…
            Et tandis que les légionnaires roulaient vers leur destin, d’autres hommes, d’autres « Seigneurs de la guerre », braves et courageux, parachutistes et commandos des unités putschistes dissoutes assistaient, la rage au cœur, à l’amené du drapeau, de ce même drapeau qu’ils avaient eux aussi défendu au prix de larmes et de sang dans les rizières d’Indochine et sur les pentes des djebels. La 10ème et la 20ème Division de Parachutistes avaient fini d’exister !…
            Pressentant désormais que la victoire était proche, le FLN multipliait ses attentats barbares… Les enlèvements d’Européens eux aussi se multipliaient… Partout la guerre redoublait de sauvagerie, la guerre qui n’en finissait pas de coucher les hommes égorgés au travers des pistes, de mutiler à tout jamais une jeunesse assoiffée de vie, de présenter son visage de terreur dans les villes en proie à l’insécurité et, en toile de fond, les morts qui criaient vengeance offrant au ciel, comme une gueule béante, les atroces blessures des gorges ensanglantées.

            Créé au lendemain de la seconde guerre mondiale, le BEP (Bataillon Etranger de Parachutistes), appellation originelle de l’unité, avait été deux fois sacrifié en Indochine. Une première fois au Tonkin où 17 légionnaires seulement revinrent d’une mission « suicide », puis à Diên Biên Phu où durant deux mois il connut le cauchemar que l’on sait. Sur le millier d’hommes qui reconstituèrent l’unité après leur premier sacrifice, moins d’une dizaine survécurent…
            Reconstitué en 1955 pour les besoins de la guerre d’Algérie sous l’appellation de REP (Régiment Etranger de Parachutistes), il mit hors de combat 8000 « fells », récupéra plus de 5000 armes mais compta également 300 tués –dont le Colonel Jeanpierre- et 500 blessés.
Pour son seul séjour en Algérie, le 1er REP avait reçu  pour ses légionnaires parachutistes, plus de trois mille citations. Son drapeau portait cinq palmes et la fourragère aux couleurs de la médaille militaire.

Il était le premier régiment de choc de l’armée française. Premier par sa bravoure, premier par son sacrifice, premier par ses héros qui le composaient, premier par ses citations, douloureusement premier par le nombre de ses morts et premier dans le cœur des Pieds-Noirs.
De toute cette gloire, il ne reste aujourd’hui que des souvenirs…
            Puis le « cessez- le- feu » fut proclamé. L’ennemi d’hier devint l’interlocuteur privilégié de l’état français… et ce fut la fin.
Une nouvelle fois le drapeau tricolore fut amené. Une nouvelle fois l’armée française plia bagages poursuivie par les regards de douleur et de mépris et les cris de tous ceux qu’elle abandonnait. Le génocide des harkis commençait…
Dans le bled –comme en Indochine- les Musulmans qui avaient toujours été fidèles à la France s’accrochaient désespérément aux camions et, à bout de force, tombaient en pleurant dans la poussière de la route. Ce sont, là, des images que seuls ceux qui ont une conscience ne pourront de si tôt oublier…
Et c’est de cette façon que mourut l’Algérie française… dans la honte, les larmes et le sang… Oui, c’était bien la fin!… la fin d’un monde… la fin d’une génération de soldats… la fin d’une épopée… la fin d’un mythe… la fin d’une race d’hommes… de vrais… celle des Seigneurs de la guerre !



            Et si ces hommes avaient choisi de se battre jusqu’au bout, s’ils avaient vomi le renoncement, c’était encore pour une certaine idée qu’ils se faisaient de la France, c’était pour l’Algérie française leur seul idéal, c’était pour le sacrifice de leurs camarades qu’ils ne voulaient pas vain, c’était pour ces milliers de musulmans qui avaient uni leur destin au leur, c’était pour ces « petits Français de là-bas » qui étaient les seuls à les comprendre et à les aimer et c’était aussi parce qu’ils avaient choisi de se fondre dans un grand corps aux réflexes collectifs, noués dans la somme des renoncements individuels et que par ce chemin, ils atteignaient à une hautaine dimension de la LIBERTE.
Mais le peuple d’Algérie, lui, n’exprimera jamais assez sa gratitude à ces « soldats perdus », à tous ceux qui, par sentiment profond, ont risqué leur vie, ont abandonné leurs uniformes, ont sacrifié leur carrière, ont été séparés de leurs familles –parfois durant de longues années- ont connu la prison, l’exil, le sarcasme de leurs vainqueurs et de ceux qui n’avaient pas osé, des lâches, des poltrons et des traîtres pour être restés fidèles à leurs serments et à leur idéal.
Le temps passera, l’oubli viendra, les légendes fleuriront, mais jamais assez l’histoire ne mesurera la grandeur de leur sacrifice.

JOSÉ CASTANO




« Combien de fois ma vie n’a-t-elle tenu qu’à un fil ? A 19 ans, j’ai été projeté dans l’aventure de la Résistance puis dans l’abîme de la déportation. A 44 ans, je suis sorti de prison, sans papiers, sans droit de vote, sans carnet de chèques… »(Cdt Elie De Saint Marc)

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Guerre d'Algérie. Le 30 avril 1961 paraît le décret de dissolution du 1er régiment étranger de parachutistes

1er Rep : ”Adieu aux souvenirs”



Les obsèques du colonel Jeanpierre, en juin 1958Comment une unité d’élite fut le fer de lance d’un putsch de généraux. “Adieu vieille Europe […] pour le ciel si brûlant de l’Algérie. Adieu souvenirs, notre vie va finir”, dit un chant de marche de la Légion.
Treillis camouflé, béret vert orné de l’insigne des troupes aéroportées : le 1er régiment étranger de parachutistes fut l’une des plus belles unités de l’armée française. L’Indochine fut son berceau, l’Algérie son tombeau. Issu des bataillons étrangers de paras, il connut des moments de gloire avant sa participation au putsch des généraux d’Alger. C’est un ancien légionnaire qui allait signer, le 30 avril 1961, jour anniversaire de Camerone, le décret de dissolution de ce régiment de Légion : Pierre Messmer, combattant de Bir-Hakeim devenu ministre des Armées du général de Gaulle.
Le Rep était né en 1948 en Algérie. Ce n’était pas encore le Rep mais le 1er bataillon étranger de parachutistes. Le 12 novembre 1948, le 1er Bep, que commande son fondateur, le capitaine Segrétain, rejoint l’Indochine et débarque à Haiphong. Le 9 février 1949, le 2e Bep, constitué au Maroc et dans le Constantinois, arrive à Saigon.
Le 1er Bep va connaître en Indochine ses pires moments de souffrance. Première épreuve : la RC4 – la route coloniale 4. Elle serpente au Tonkin, le long de la frontière avec la Chine, dans un décor dément de collines calcaires aux pentes abruptes couronnées d’une jungle épaisse. Des postes de l’armée française la jalonnent.
Mais en 1949, avec la prise de pouvoir des commu nistes en Chine, le Viêt-minh dispose d’une puissante base arrière de laquelle peu vent lui parvenir des armes et des approvisionnements. D’où la décision du commandement français, en septembre 1950, d’évacuer Cao Bang et les postes situés sur la RC4 au nord de Lang Son, considérés comme indéfendables.
Le plan prévoit qu’une colonne partie de Lang Son, aux ordres du lieutenant-colonel Lepage, un artilleur, ira à la rencontre de la garnison de Cao Bang évacuée sous les ordres du lieutenantcolonel Charton, officier de Légion expérimenté. Puis les deux colonnes, ayant fait leur jonction, se replieront ensemble sur Lang Son, à 130 kilo mètres au sud-est de Cao Bang. La manoeuvre se transforme en calvaire, dans la jungle où grouille l’ennemi. Le bataillon, “su prême pensée et suprême espoir” comme la Garde impériale à Waterloo, ne peut empêcher le désastre face à un adversaire très supérieur en nombre et bien armé. Les blessés français sont achevés à la baïonnette. Le lieutenant-colonel Charton échappe à la mort grâce à ses galons, mais connaîtra de longues années de captivité dont il sortira brisé à jamais. Le bataillon perd tous ses commandants de compagnie et plus de la moitié des chefs de section ; il ne compte que 9 officiers et 121 légionnaires rescapés. Son chef, Segrétain, a été tué. Le général Giap, qui commande l’armée du Viêt-minh, lui fera rendre les honneurs militaires.
À la fin de 1952, le 1er Bep reconstitué tient à sa revanche à Na San, toujours au Tonkin. Sur ordre du général Salan, qui commande le corps expéditionnaire, un camp retranché a été aménagé dans cette cuvette située à 190 kilomètres au sud-ouest de Hanoi. La Légion, notamment ses deux bataillons paras, constitue la moitié des effectifs. L’objectif, attirer l’ennemi dans une nasse pour l’abattre, est atteint : les divisions de Giap se brisent sur la position.
Par malheur, on voudra refaire Na San. Ce sera Diên Biên Phù. Le 1er Bep du commandant Guiraud, première unité de Légion à poser le pied dans le camp retranché, y est parachuté le 21 no vembre 1953. Il compte 654 hommes, dont 19 officiers. Le 13 mars 1954, Giap atta que. Retenant la leçon de sa défaite à Na San, il a installé, en secret, de l’artillerie acheminée à dos d’homme sur les collines couvertes de jungle entourant le camp. Les points d’appui sont pilonnés ; les assauts se succèdent. En avril, les Français comptent 4 000 combattants contre l’équivalent de deux divisions viêt-minh, soit 40 000 hommes.
Des moments pour la gloire, d’autres pour l’amertume
Le camp reçoit des renforts ; parmi eux, le 2e Bep. Cela ne suffit pas à combler les pertes. Le 25 avril 1954, le commandant Guiraud prend le commandement du “bataillon de marche des Bep”. Subsiste alors l’effectif d’une compagnie pour le 1er Bep, de deux compagnies pour son frère jumeau. Le 7 mai, les troupes de Giap submergent le camp retranché. Après Cao Bang, le bataillon connaît sa deuxième mort.
Il renaît à la fin de l’année 1954 avec, à sa tête, le commandant Jeanpierre, et quitte l’Indochine en février 1955 pour l’Algérie. D’abord envoyé dans l’Aurès, bastion de la rébellion, et le massif des Nementchas, le bataillon de vient un régiment. Ainsi naît le 1er Rep, basé à Zéralda, à l’ouest d’Alger. Il sera de tous les coups durs.
En 1956, Nasser nationalise le canal de Suez. Français et Britanniques montent une formidable opération pour en reprendre le contrôle. C’est ainsi que le 1er Rep débarque à Port-Fouad le 6 novembre. Mais il n’ira pas plus loin. Les pressions conjointes de Washington et de Moscou font reculer Londres et Paris.
Quelques mois plus tard, le général Jacques Massu, commandant de la 10e division parachutiste à laquelle appartient le 1er Rep, reçoit pour mission de liquider les groupes terroristes qui ensanglantent Alger. Un “boulot de flic” accompli sans plaisir, mais qui vaudra néanmoins aux officiers chargés de l’accomplir d’être désignés comme tortionnaires. Plus tard viendra le “plan Challe” consistant à casser, par de grandes opé rations regroupant les unités de choc, l’appareil militaire du FLN. Là encore s’illustreront les légionnaires parachutistes.
Deux hommes d’exception vont attacher leur nom à l’histoire du 1er Rep : Pierre Jeanpierre et Hélie Denoix de Saint Marc. Pupille de la Nation – son père, capitaine d’infanterie, a été tué en 1916 – , Jeanpierre rejoint la Légion dès 1937, après avoir fait ses classes à Saint-Maixent. La guerre lui vaut ses premières décorations, et la résistance une déportation à Mauthausen-Dora. En 1948, capitaine, il est affecté à Philip peville au 1erBep. En 1950, c’est la tragédie de la RC4 : devant l’épuisement du commandant Segrétain, il prend la tête du batail lon. Absent de Diên Biên Phù (il était déjà affecté en Algérie), il reçoit en octobre 1954 le commandement du 1erBep reconstitué. Un an plus tard, le voici com mandant provisoire du bataillon transformé en régiment, dont le chef titulaire est le lieutenant-colonel Brothier. En mars 1957, en pleine bataille d’Alger, il prend officiellement le commandement du 1er Rep ; il sera blessé en octobre lors de la capture de Yacef Saadi, opération qu’il dirige personnellement.
La prise de risque personnelle, telle est la constante de la “méthode Jeanpierre”. Au début de 1958, lors de la “bataille des frontières”, son régiment se trouve en gagé dans le nord du Constantinois. Dédaignant tout armement lourd, ina dapté à une forme de guerre qui réclame avant tout souplesse et rapidité, les paras légionnaires remportent d’impressionnants succès contre les unités de l’ALN. Ces combats, Jeanpierre les dirige à par tir de son Alouette, hélicoptère léger extrêmement maniable, survolant au plus près les zones d’affrontement pour diriger les manoeuvres.
“Si ça tourne mal, je prends tout sur moi”
C’est ainsi qu’il trouve la mort au dje bel Mermera, dans la région de Guelma, le 29 mai 1958. Une balle coupe l’arrivée d’essence de son hélicoptère, qui s’écrase au sol. Le général de Gaulle, revenu au pouvoir depuis peu, viendra s’incliner le 6 juin sur sa tombe provisoire à El-Alia. En juillet 1961, la 146e promotion des officiers de Saint-Cyr-Coëtquidan sera baptisée “Colonel Jeanpierre”.
À ce moment, cependant, le 1er Rep n’existe plus. Sa descente aux enfers s’est amorcée à mesure que se précisait la vo lonté du chef de l’État de conduire l’Algérie à l’indépendance. De nombreux officiers ont vécu avec douleur la fin de l’Indochine française et l’abandon de populations restées fidèles à la France. Ils ont connu l’humiliation de l’expédition manquée de Suez. Ce qui leur est annoncé, c’est, à leurs yeux, une nouvelle défaite alors même que, sur le terrain, la guerre est gagnée. Et une fois de plus, l’abandon des populations fidèles. Une défaite et un abandon de trop.
Un homme incarne ce refus : Hélie de Saint Marc. À bien des égards, le destin de cet officier d’une parfaite droiture s’identifie à celui du lieutenant-colonel Jeanpierre. Entré comme lui dans la Résistance, il a lui aussi connu la déportation. Il a servi sous ses ordres dans les légionnaires parachutistes. Il a, avec lui, participé à l’expédition de Suez. Directeur de cabinet du général Massu en 1957-1958, il a vécu les deux batailles d’Alger. Et s’il n’était pas dans le Constan tinois lorsque Jeanpierre s’y est fait tuer, il a retrouvé le 1er Rep en 1961, comme adjoint du colonel Guiraud, l’ancien de Diên Biên Phù.
Au début de 1961 se produit un événement inouï dans les annales de la Légion étrangère, où discipline et obéissance constituent des principes fon damentaux : trois officiers du 1er Rep, parmi lesquels le commandant de la 1re compagnie, le capitaine Pierre Sergent, refusent de partir en opération. Pour eux, le combat n’a plus de sens, ajouter des morts à d’autres morts leur paraît criminel et stupide. Évitant le conseil de guerre, les trois rebelles sont mutés. Ces troubles de conscience n’épargnent pas Saint Marc. Déchiré entre son devoir de soldat, son sens de l’honneur et le pressentiment de la tragédie, il va se rallier à la personne du général Challe, ancien commandant en chef en Algérie, qui, le 22 avril 1961, choisit de se dresser contre le pouvoir légal, non pas pour le renverser mais pour lui prouver qu’il a tort. Et Saint Marc s’embarque dans l’aventure. « Si ça tourne mal, dit-il à ses capitaines de compagnie, je prends tout sur moi. »
L’aventure tourne court. Le 1er Rep a constitué le fer de lance de la prise d’Al ger au bénéfice des généraux rebelles, Challe, Jouhaud, Zeller et Salan. En état d’arrestation, les légionnaires quittent leur camp de base de Zéralda en reprenant les paroles de la chanson d’Édith Piaf dont ils vont faire aussi la célébrité : « Non, rien de rien, non, je ne regrette rien… » Une page de l’histoire de la Légion se tourne. Cinquante ans plus tard, les capitaines, qui ont 80 ans, en gardent, intacte, la nostalgie.  
Claude Jacquemart



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Le légionnaire est un volontaire involontaire, un homme qui se résout à être soldat lorsque sa volonté cède devant un destin plus fort que lui. Il sert son destin, et bien le servir est une obligation personnelle qui ne regardent que lui. Dans la dure discipline il sauve sa liberté d'homme ; il est d'autant plus son propre maître qu'il sert plus, d'autant plus fier qu'il sait combien son service est humble... Chacun combat pour soi, pour quelque chose qu'il a fait personnellement plutôt que pour une raison personnelle... Dans cette troupe internationale, on part d'obligations personnelles entièrement souscrites pour atteindre à l'obligation collective.Partout et toujours, je les ai trouvés pareils à eux même et par conséquent, les meilleurs. Dignes et intrépides sous le feu, ils restent fidèles à la règle d'honneur qui interdit à la légion de courber la tête devant le souffle horrible de la mort

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